Vœu concernant une structure d’accueil d’urgence pour des jeunes filles et des femmes victimes de violences voeu proposé par G. Colomer

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Ce voeu entre dans le cadre de la Journée des femmes. Nous reprenons ici un voeu que nous avions déjà proposé au Conseil Municipal le 18 novembre 2003.

« Au vu de l’actualité récente dans notre ville et ailleurs et des engagements gouvernementaux et ministériels, nous émettons le voeu qu’une structure d’accueil d’urgence soit mise en place à Châtenay-Malabry. A l’époque, vous l’aviez refusé, bien que déjà et malgré les deux structures existantes pour le département des Hauts-de-Seine et malgré les efforts des assistantes sociales agissant sur Châtenay, il était difficile de trouver rapidement une place libre tant ces structures étaient engorgées. Vous aviez argumenté que grâce à l’application d’une loi prochaine, les solutions conjugales conflictuelles trouveraient une solution. En effet, après jugement, la femme victime resterait dans son logement, dont le mari violent serait écarté.

Parce que vous aviez vraiment cru à cette bonne idée du gouvernement RAFFARIN, parce sous les coups, une femme se dit « je vais porter plainte et puis après un bon moment, il va peut-être y avoir un jugement et peut-être la violence de mon mari va être reconnue et peut-être après sa condamnation, il quittera l’appartement et peut-être il me laissera tranquille ainsi que les enfants etc. », elle a surtout le temps d’y perdre sa vie, comme les six femmes qui meurent chaque mois sous les coups de leur compagnon ou de leur mari. Elle a surtout peur : on estime en effet que seulement une femme sur onze ose aujourd’hui porter plainte, démarche éminemment courageuse avec de graves conséquences pour elle et ses enfants.

Ainsi, comme en novembre 2003, l’urgence est toujours là et devient même de plus en plus impérieuse. Sur les huit dernières années, mauvais traitements et abandons d’enfants ont presque doublé selon les statistiques nationales. Comme le rappelaient les spots diffusés à la télévision lors de la Journée des femmes le 8 mars dernier, aujourd’hui en France une femme sur dix est victime de violences conjugales, ce qui veut dire et au-delà de la sécheresse des chiffres que chacun d’entre nous connaît une femme battue.

C’est pourquoi nous réitérons notre voeu - et avec insistance face à l’urgence - que soit mis en place à Châtenay-Malabry une structure d’hébergement pour les jeunes filles ou les femmes subissant des violences familiales ou conjugales, à l’écart de la cité et où elles puissent se réfugier en urgence sans avoir de compte à rendre à personne. »

Monsieur Georges SIFFREDI, Maire de Châtenay-Malabry, Député des Hauts-de-Seine :Je vais donc vous répondre. Le sujet étant sérieux, je ne voudrais pas polémiquer dès le départ mais simplement rectifier une petite erreur. Vous nous avez bien déposé déjà une fois ce voeu mais il s’agissait de la séance du Conseil Municipal du l8 décembre : nous n’avons jamais siégé le l8 novembre.

Cette précision étant apportée, nous vous avions alors expliqué pourquoi celui-ci ne correspondait pas à l’intérêt réel des femmes victimes de violences conjugales. Ce que nous avions dit alors reste toujours vrai et je vais donc vous faire la même réponse mais juste un peu réactualisée.

« Le 26 novembre 2003, nous avons inauguré la Maison de la justice et du droit de Châtenay¬Malabry, la première de notre département. La création de cet établissement s’inscrit dans le droit fil des actions que nous menons depuis bientôt dix ans mon équipe municipale et moi-même afin d’apporter une meilleure qualité de vie, une meilleure sécurité à nos concitoyens. C’est pour cela aussi que nous avons signé avec l’Etat notre Contrat de Ville en octobre 2000, notre contrat local de sécurité en novembre de la même année et ouvert notre point d’accès au droit en novembre 2001.

Comme vous le savez, nous n’avons pas attendu la médiatisation des violences conjugales pour prendre la mesure du phénomène. C’est vrai d’ailleurs dans bien des domaines et notamment en matière de prévention et de sécurité. Nous savons aussi d’expérience que ces violences conjugales s’exercent non seulement par des hommes sur des femmes mais aussi par des femmes sur des hommes, des parents sur des enfants voire même des enfants sur des adultes ou sur leurs parents. La violence peut, hélas, se manifester n’importe où et nous
devons donc la prévenir quand cela est possible, la punir quand il le faut.

L’ aide aux victimes est, évidemment, un des axes privilégiés de l’ action que nous conduisons contre ces violences et c’est bien dans ce cadre que doit s’inscrire l’action en faveur des femmes battues. En ce qui concerne les violences conjugales, qui font l’ objet de votre voeu, nous constatons qu’en dehors de l’écoute par des spécialistes, juristes ou psychologues, les femmes recherchent avant tout un appui matériel, un soutien financier et une aide dans les démarches à effectuer .

C’est pour cela que nous avons mis en place l’équipe de médiatrices culturelles de la Passerelle, qui accueille en majorité des femmes et des jeunes filles venant pour la plupart pour des problèmes sociaux liés à la sexualité, au logement ou à l’emploi. C’est aussi pour cela que nous avons passé une convention avec le Centre d’information sur le droit des femmes et de la famille de Boulogne¬Billancourt, qui intervient dans le cadre de la Maison de la justice et du droit mais également de la Passerelle. De plus, dans notre centre municipal de santé, une conseillère conjugale et familiale du planning familial assure des consultations anonymes et gratuites en partenariat avec les actions sociales du Département.

Au point de vue hébergement et afin de proposer aux victimes un éloignement salutaire, nous pouvons faire appel au foyer des jeunes filles de Versailles et en cas de besoin, nous disposons de certains de nos logements-passerelles, qui sont au nombre de neuf. Nous collaborons également étroitement avec la circonscription d’action sociale, qui assure des prises en charge hebdomadaires et nous permet de diriger si nécessaire les victimes sur le centre de Flora Tristan de Châtillon ou dans le cadre de procédures plus lourdes, les centres de Nanterre ou de Gennevilliers.

Force est toutefois de constater que selon ces professionnels compétents et dévoués, plus de 80 % des femmes battues ne donnent pas suite aux propositions d’hébergement qui leur sont faites. Elles préfèrent - et de loin - les solutions familiales ou amicales qu’ elles ont elles-mêmes choisies. Ce qu’ elles souhaitent, c ’ est que la séparation ne se fasse pas à leur détriment car en général, non seulement elles sont victimes de violence mais encore elles se voient, en fuyant, privées de domicile. Ce qu’elles veulent.- et ce n’est que justice - c’est conserver leur domicile pour elles-¬mêmes et pour permettre à leurs enfants de poursuivre leur scolarité dans les meilleures conditions. C’ est le fautif qui doit être expulsé, c’ est le persécuteur qui doit être puni, pas les victimes.

Permettez-moi d’ajouter que ce préoccupant problème de violences conjugales ne constitue pas un phénomène récent. Déjà en 1999, le Secrétaire d’Etat aux droits des femmes avait fait réaliser une enquête montrant que les violences conjugales concernaient une femme sur dix et qu’ elles relevaient de toutes les classes sociales. Déjà en février 2001, le Professeur Roger HENRlON avait remis un rapport au Ministre de la Santé Monsieur Bernard KOUCHNER et qui indiquait notamment que sur 652 femmes victimes d’homicides entre 1990 et 1999 dans Paris et sa proche banlieue, la moitié avaient été tuées par leurs maris ou leurs compagnons : un chiffre terrifiant. Pourtant, le gouvernement socialiste de l’époque n’ avait rien fait.

Une fois de plus, c’est le gouvernement de Monsieur Jean-Pierre RAFFARIN qui s’est attaqué au problème. Ainsi, la loi du 26 mai 2004 sur le divorce a prévu de nouvelles dispositions pour mieux protéger les victimes et répondre aux situations d’urgence. Vous dites qu’il y a urgence à agir : oui il y a urgence mais pas à agir n’importe comment. Ce que vous proposez, c’est la double peine : la femme battue est, en plus, chassée de chez elle. Nous refusons de cautionner un tel scandale. L’urgence, c’est l’éviction du conjoint ou du compagnon violent, c’est le maintien de la victime dans son foyer.

C’est pourquoi Madame Nicole AMELINE, Ministre de la Parité et de l’Egalité Professionnelle, en a fait l’une de ses principales mesures du plan lancé en novembre 2004 et visant à accompagner les femmes victimes de violences. Comme l’a souligné le Ministre, l’objectif est de montrer aux victimes que de l’appel de détresse au retour à l’autonomie, la société est là, bien à leurs côtés. Parce qu’une telle solution apparaît plus conforme aux attentes des jeunes filles et des femmes victimes de violences, nous ne voterons pas votre voeu. »

Je le mets donc aux voix. Qui est contre ? Trente voix contre. Qui est pour ? Huit voix pour.
Le voeu est rejeté par la majorité ; les élus de l’opposition ont voté pour